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14 mars 2009 6 14 /03 /mars /2009 15:32

J'ai cité dans les articles précédents mon ami Philippe d'Anchald, grand amateur de musique baroque, d'orgues et de J.S. BACH. il est aussi un redoutable chercheur sur internet et l'histoire suivante qu'il nous raconte intéressera certainement de nombreux musiciens et mélomanes.

Je ne sais pas si cette histoire est extraordinaire mais elle est amusante ... Je me permets de vous résumer rapidement l'historique de cette affaire.

En 2001, je pense, je cherchais des renseignements sur la polémique qui
agitait le petit monde de l'orgue au sujet du projet de reconstruction de
l'instrument de Gottfried Silbermann qui avait disparu lors de l'incendie
de la Frauenkirche de Dresde en février 1945.

Je suis alors tombé sur le site internet d'un avocat de New-York, M. Teri Towe :
http://www.npj.com/homepage/teritowe/frk.html
et de là,  sur :
http://www.npj.com/homepage/teritowe/jsbindex.html
puis sur :
http://www.npj.com/homepage/teritowe/jsbbwv7.html
qui m'apprenait qu'un manuscrit de Bach  ( une basse chiffrée de la cantate BWV 7) avait été acquis par cet avocat en 1983. Ce manuscrit avait été ( ou aurait été)  donné  par un successeur du grand Cantor, August Eberhard Müller (1767-1817) à Sigismond Neukomm, lors de son retour de saint Petersbourg fin 2008, c'est à dire avant son arrivée à Montbéliard en 1809.
La première page du manuscrit de M. Teri Towe porte une inscription de la main du Chevalier Sigismond Neukomm : "Dies ist die Handschrift des grossen Joh. Sebast. Bach. Sein Nach/folger
H: [= Herr] A. E. Müller gab sie mir auf meiner Durchreise durch Leipzig
zum/Andenken." ("Ceci est de la main du grand Joh. Sebast. Bach. Son
successeur  Herr A. E. Müller me l'a donné comme souvenir quand je suis passé à Leipzig .")
En réalité, il s'agit bien de August Eberhard Müller.

Ce manuscrit comportait à l'origine 8 pages (ou 4 pages recto-verso),
j'avais également noté dans un coin de ma tête que deux pages (plus
précisément une page recto/verso) manquaient donc à ce petit recueil.

Quelques années plus tard, sur la suggestion de  Loïc Métrope, j'ai été
conduit à m'interessser d'un peu plus près à la personnalité de Sigismond Neukomm et plus particulièrement à son inventaire après décès. En examinant ce document, je remarquais que Neukomm avait conservé jusqu' à sa mort des manuscrits de Mozart et de Haydn et je me suis demandé ce qu'ils étaient devenus. Outre ce que l'on pouvait retrouver à la BNF-Musique, je me suis enquis de savoir s'il n'y avait pas des manuscrits dans d'autres bibliothèques. C'est alors que mes recherches m'ont conduit sur :
http://www.pm.paris4.sorbonne.fr/main/activite/identites.htm

dans lequel il était dit, sous la plume de Madame Massip, que le Musée de Melun conservait "un feuillet manuscrit autographe de J. S. Bach. Il s’agit de deux pages d’une partie de basse tirée d’une composition non identifiée (une cantate ?, une passion ?), don de Sigismond Neukomm à Auguste Vincent."

Immédiatement, m'est revenue à l'esprit l'histoire du manuscrit "américain" et avant même de poursuivre mes investigations, j'ai écrit à Teri Towe pour avoir quelques détails concernant notamment le format de son manuscrit, la qualité du papier, etc et fort de ces renseignements, j'ai pris contact au début de l'été avec la conservatrice du Musée de Melun afin d'obtenir une copie des pages attribuées à JS Bach.

Au vu des pages précédant et suivant immédiatement les parties manquantes dans le manuscrit américain, il a été très rapide de confirmer que le manuscrit  de Melun est bien un  extrait d'une basse chiffrée de la cantate "Christ unser Herr zum Jordan kam" BWV 7 de J.S BACH, cantate écrite pour la fête de St Jean Baptiste et qui peut donc  être datée des jours précédents le 24 juin 1724 et correspondait aux pages 3 et 4, c'est à dire aux 17 dernières mesures du choeur d'ouverture et tout l'aria pour Basse "Merkt und hört, ihr Menschenkinder".

Le Manuscrit de Melun ne  figure pas dans l'inventaire après décès de
Neukomm le 3 avril 1858. Neukomm l'aurait-il vendu ou donné de son vivant ? Ou s'agirait-il d'une omission de Anton Neukomm son frère et héritier qui l'aurait cédé ensuite ( à un  collectionneur du nom de Kafka....). Toujours est il que le manuscrit réapparait en 1881 en salle des ventes à Paris et, à la suite de ventes successives; il est aujourd'hui la possession de cet avocat de New-York , collectionneur passionné.

Comment expliquer le fait que ce manuscrit ait pu être ainsi démantelé ?
J'émets l'hypothèse que Neukomm peut-être séduit par le talent prometteur du jeune Auguste Vincent, élève d'Edouard Wolff, grand pianiste polonais, ami de Chopin et professseur de Francis Thomé et de Chabrier ( et peut-être ami également de Neukomm), ait spontanément offert cette page à ce jeune pianiste qui affichait peut-être déjà un goût prononcé pour les objets de collection, les autographes, etc. Je pense de plus qu'il a  souhaité conserver la première page sur laquelle figurait la mention de l'origine du document et se serait plus volontiers séparé de la page suivante. On sait d'ailleurs que cette page fut conservée sous verre par les époux Vincent...Il reste à examiner plus avant les collections d'Auguste Vincent qui sont aujourd'hui conservées par la Bibliothèque Municipale de Melun  (et non pas le Musée....) pour éventuellemnt trouver des renseignements complémentaires.

Les musicologues discutent toujours du point de savoir si ce manuscrit , et donc la page recto/verso de Melun ,  - et comme bien d'autres s'agissant des cantates, d'ailleurs- est complètement ou non de la main du cantor de Leipzig. Il semble que seraient de Bach lui-même au moins  certaines mentions  comme "Aria" etc. On sait que Bach, toujours pressé pour préparer en temps voulu ses cantates, devait recourir à sa femme,  à ses élèves ou à d'autres copistes, pour que chaque partie soit disponible en temps voulu...

A l'initiative de M. Towe , un article est paru dans un quotidien américain
"le Baltimore Sun" sous la signature de Tim Smith, et la nouvelle a été reprise ici et là, notamment dans "Choir and Organ" en Grande Bretagne.

Voilà, vous savez tout.....


Pour le recto de la partition : copyright Musée de Melun

Et à propos de Loic Metrope  et de Neukomm, voir le lien
suivant : http://www.musimem.com/neukomm.htm


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